# Poême 1 de Bertrand d'Aquitanie I Le soir qui vient de la rive, Qui dans ta clarté s'avive, Reflète dans tes yeux, Une lumière où se lève L'absence étrange qui rêve La lueur pâle des feux, II Que le sombre apte à frémir, Elève immense soupir, Quand tes regards sont pareils, Aux étoiles luminescentes, Qui s' élancent éblouissantes, Dans la blancheur des soleils. . . III Le vent mobile de l'ombre, Dans la lumière qui s'ombre Soulève dans tes cheveux D'eau constellés de lointaines Lueurs qui se font sirènes, Et tes regards dangereux. # Poème 2 de Bertrand d'Aquitanie D'un pas leste et galant sautant hors du bateau, Un grand seigneur, en très somptueux équipage Pose ses doigts gantés sur l'épaule du page Qui porte dans ses bras l'épée et le manteau. Le compliment en vers qu'on remettra bientôt Est barbouillé par un pédant sur une page, Et les musiciens en chœur font du tapage Sous la fenêtre ouverte et sombre du château. De son retrait, la dame entend voix et guitares, Tandis que sort mari, truste, en proie aux catharres, Fait dans l'herbe du parc tendre maint piége-à-loups. Mais près du mur, caché dans l'ombre, sur la pierre. Pour donner un grand coup d'estoc au vieux jaloux, Le rouge spadassin aiguise sa rapière. # Poème 3 de Bertrand d'Aquitanie Tel qu' un morne animal, meurtri, plein de Poussière, La chaîne au cou, hurlant au chaud soleil d' été, Promène qui voudra son coeur ensanglanté Sur ton pavé cynique, ô plèbe carnassière ! Pour mettre un feu stérile en ton oeil hébété, Pour mendier ton rire ou ta pitié grossière, Déchire qui voudra la robe de lumière De la pudeur divine et de la volupté. Dans mon orgueil muet, dans ma tombe sans gloire, Dussé-je m' engloutir pour l' éternité noire, Je ne te vendrai pas mon ivresse ou mon mal, Je ne livrerai pas ma vie à tes huées, Je ne danserai pas sur ton tréteau banal Avec tes histrions et tes prostituées.